Gaudissart II
LA COMEDIE HUMAINE – Honoré de Balzac XIIe volume des œuvres complètes de H. DE BALZAC par Veuve André HOUSSIAUX, éditeur, Hébert et Cie, Successeurs, 7, rue Perronet, 7 – Paris (1877)
Scènes de la vie parisienne
GAUDISSARD II
Nouvelle écrite en novembre 1844 Dédicacée A MADAME LA PRINCESSE CRISTINA DE BELGIOJOSO Née TRIVULCE
Analyse de l’oeuvre Sur Gaudissard II qui fut publié presque en même temps dans le quotidien La Presse et dans le recueil d’Hetzel, Le Diable à Paris, il n’y a rien à dire qui n’ait été dit à propos d’Un homme d’affaires. C’est un croquis pris sur le vif d’une scène quotidienne du commerce parisien : il s’agit de réussir à vendre un châle à une Anglaise, cliente difficile et vaniteuse. Cette scène amusante, présentée avec vivacité et avec malice, ne provoquerait aucun commentaire particulier si elle n’était l’occasion de rendre hommage à la précision et à l’ingéniosité des chercheurs qui s’attachent à reconstituer la genèse de ces récits qui paraissent à première vue des improvisations brillantes du romancier. Une excellente enquête de Mme Anne-Marie Meininger est un exemple significatif des découvertes qu’on peut faire en confrontant un moment de la vie de Balzac avec une œuvre que lui inspirent tout simplement ses démarches et ses promenades habituelles. On s’aperçoit alors que Gaudissard II n’est pas seulement un croquis pris sur le vif, mais une « chose vue » que le hasard a présentée à Balzac, dont il s’est amusé, qu’il a enregistrée et mise en scène. Il allait très souvent chez son éditeur Hetzel qui venait d’ouvrir une librairie, 76, rue de Richelieu : on y vendait Le Diable à Paris et les tomes en cours de La Comédie Humaine. Dans le même immeuble se trouvait un brillant magasin de nouveautés, à l’enseigne du Persan, comme dans la nouvelle : on y vendait des châles et avec un tel succès que le propriétaire du magasin acheta bien vite le local occupé par Hetzel et se retira quelques années plus tard après avoir amassé une confortable fortune. Cet habile commerçant se nommait Lavanchy, l’histoire n’a pas retenu son nom. Mais de l’autre côté de la rue habitait un propriétaire nommé André Germain Gaudissard. Balzac considéra à juste titre que ce nom lui appartenait aussi bien qu’à celui qui le portait. Il le donna à son marchand de châles qui devint ainsi le successeur de L’Illustre Gaudissart que les lecteurs de Balzac avaient déjà accompagné lors de ses campagnes dans l’arrondissement de Vouvray. Balzac avait donc trouvé sa scène toute faite. Mais il y avait des détails à inventer, des personnages à faire vivre, les vendeurs, le négociant lui-même, toute une scène à « monter ». Pour cette partie de son travail, Balzac ne se donna pas davantage de peine. Anne-Marie Meininger, qui connaît les tâcherons littéraires du temps de Louis-Philippe aussi bien que les dossiers des archives, a trouvé dans Le Livre des Cent et un publié en 1834 un sketch d’Auguste Luchet qui traitait déjà le sujet choisi par Balzac et qui lui fournissait la mise en place et les personnages dont il avait besoin. On comprend pourquoi Balzac pouvait écrire à Mme Hanska en parlant de ces scènes faciles qui avaient tant de succès : « J’ai broché mes articles du Diable en un moment ». Ces médaillons amusants ne sont pas, autant qu’on pourrait le croire, en marge de La Comédie Humaine. Gaudissart II termine le tableau du commerce parisien, c’est le terme d’une évolution. Au début, il y a la boutique encore patriarcale de La Maison du chat qui pelote dont le digne M. Guillaume abandonne la direction en 1811, c’est le commerce du temps de l’Empire. Plus tard, La Reine des Roses, le magasin de César Birroteau, montre un négociant sous la Restauration, décoré, important, lançant ses produits. Enfin Gaudissart II fournit la dernière image, celle du gros commerçant qui vit au milieu des dorures, dans le clinquant d’un magasin somptueux, sous la protection d’une enseigne exotique, annonçant le règne du prospectus et le triomphe de la publicité.
L’Histoire Une Anglaise très « collet-monté » se présente au Persan, grand magasin de nouveautés spécialisé dans les châles avec l’intention d’acheter un bel article à bas prix. Tout ce qu’il y a de plus magnifique lui est montré, mais rien ne lui semble assez beau et tout lui semble surtout trop cher. Après lui avoir montré ses plus belles pièces, le commis lui exhibe des produits de qualité inférieure, ventant que ces articles d’un luxe raffiné sont plus onéreux que les modèles qu’il lui a présentés. Après démonstration de tous les châles, écharpes et carrés susceptibles d’intéresser sa hautaine cliente, à la suite d’innombrables essayages, tous infructueux, le commis déclare forfait et annonce qu’il n’a plus rien. A ce moment là, le patron qui n’a rien loupé de la scène, intervient en lui proposant son dernier châle : un châle d’une grande rareté, un des sept châles remis par Selim à l’empereur Napoléon. Sa curiosité et sa vanité aiguisées, l’Anglaise demande à l’essayer. Il s’agit, en fait, d’un vieil article invendu passé de mode parce qu’il n’est plus au goût du jour. Ce Châle démodé d’une valeur de quinze cents francs lui sera finalement vendu six-mille par le talent commercial déployé par le négociant. La cliente enchantée, quitte le magasin, convaincue d’avoir fait une bonne affaire et le commerçant se félicite d’avoir pu écouler un article mit au rebut.
Les personnages Gaudissard II : Fils de Félix Gaudissart, commis voyageur puis directeur de théâtre, né en 1792. Jean-Jacques Bixiou : Caricaturiste né en 1797 de son père Bixiou, épicier et premier mari de Mme Descoings. Source analyse : Préface extraite, du tome XVI, recueillie d’après le texte intégral des œuvres de la Comédie Humaine publié par France Loisirs 1986 sous la caution de la Société des Amis d’Honoré de Balzac.
Source histoire : Encyclopédie universelle Wikipédia. Source généalogie des personnages : Félicien Marceau « Balzac et son monde » Gallimard.
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